Marchés publics : les principaux modes de passation permettant la négociation

Marchés publics : les principaux modes de passation permettant la négociation

La réglementation des marchés publics

Les entités publiques, dont notamment les pouvoirs publics locaux tels que les communes, les provinces et les intercommunales, sont soumises à la législation sur les marchés publics en tant que pouvoirs adjudicateurs au sens de l’article 2, 1°, de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics.

Lorsqu’une opération envisagée par un pouvoir adjudicateur implique la conclusion d’un contrat à titre onéreux, en partenariat avec un ou plusieurs opérateurs économiques, qui a pour objet l'exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services, elle est soumise à la réglementation relative aux marchés publics.

Cela signifie que l’ensemble de la procédure doit respecter les règles et principes définis par la législation sur les marchés publics, et plus particulièrement :

Les principaux modes de passation permettant la négociation

La réglementation prévoit plusieurs modes de passation permettant la négociation. 

Contrairement aux procédures qui ne supposent pas de négociations (en particulier la procédure ouverte et le procédure restreinte), recourir à ces modes de passation ne peut se faire que dans les cas déterminés par la loi, et à la condition de motiver que l’on se trouve bien dans l’un de ces cas.

La négociation doit toujours se réaliser dans le respect des principes d’égalité, de transparence, de non-discrimination et de proportionnalité. Concrètement, au cours de la négociation, le pouvoir adjudicateur devra assurer l’égalité de traitement de tous les soumissionnaires.

Dans cet article, nous examinerons les trois principales procédures permettant la négociation dans les marchés :

  1. La procédure concurrentielle avec négociation 

  2. La procédure négociée directe avec publication préalable 

  3. La procédure négociée sans publication préalable

La procédure concurrentielle avec négociation

Définition

La « procédure concurrentielle avec négociation » est définie comme « la procédure de passation à laquelle tout opérateur économique intéressé peut demander à participer en réponse à un avis de marché, dans laquelle seuls les candidats sélectionnés peuvent présenter une offre, les conditions du marché pouvant ensuite être négociées avec les soumissionnaires, et qui s'applique uniquement aux marchés relevant du champ d'application du titre 2 » (article 2, 24°, de la loi du 17 juin 2016).

Cette procédure se déroule donc en deux étapes distinctes : une phase de sélection et une phase de négociation – aboutissant à une évaluation des offres finales –.

Elle est ouverte à tout opérateur économique intéressé de soumettre une demande de participation. Seuls les candidats sélectionnés seront ensuite invités à présenter une offre et une négociation des offres déposées sera organisée afin d’améliorer leur contenu et répondre au mieux aux besoins du pouvoir adjudicateur.

Le recours à ce mode de passation n’est possible que dans les cas limitativement prévus par l’article 38, § 1er, 2°, de la loi du 17 juin 2016, à savoir :

1° Pour des travaux, fournitures ou services répondant à au moins un des critères suivants :

a)     Les besoins du pouvoir adjudicateur nécessitent une adaptation de solutions disponibles.

b)     Le projet inclut une conception ou des solutions innovantes.

c)     La nature, la complexité ou les risques du marché imposent des négociations préalables.

d)     Les spécifications techniques ne peuvent être définies avec précision à l’aide de références normatives.

e)     L’accès au marché est réservé à certains opérateurs économiques et son montant est inférieur au seuil de publicité européenne.

f)      Le montant estimé du marché est inférieur à 750.000 euros pour les travaux.

2° Lorsque seules des offres irrégulières ou inacceptables ont été reçues dans le cadre d’une procédure ouverte ou restreinte.

Procédure

Le déroulement de la procédure comprend les étapes suivantes :

  • Publication de l’avis de marché :

    • Ce premier avis permet aux opérateurs intéressés de soumettre leur demande de participation.

    • Le nombre minimum d’opérateurs invités est de 5, un nombre maximum peut être prévu.

    • Le pouvoir adjudicateur peut limiter le nombre de candidats qui seront invités à participer à la procédure.

      Dans ce cas, il indique dans l’avis de marché les critères de sélection objectifs et non discriminatoires qu’il prévoit d’appliquer pour départager les candidats.

  • Sélection des opérateurs :

    • Les opérateurs sélectionnés (qui répondent donc aux critères de sélection) sont invités à déposer une « une offre initiale, qui sert de base aux négociations ultérieures », sur la base des critères et exigences identifiés dans le cahier spécial des charges.

    • Le délai pour introduire cette offre est de 30 jours minimum (il peut être réduit en cas d’urgence).

  • Phase de négociation :

    • Les offres initiales et ultérieures font l’objet d’une négociation.

      Le pouvoir adjudicateur peut attribuer le marché sur la base des offres initiales sans négociation uniquement s’il a indiqué, dans les documents du marché, qu'il se réserve la possibilité de le faire et sous réserve d’une motivation.

    • Les exigences minimales et les critères d’attribution ne sont pas sujets à négociation.

    • Les négociations se poursuivent jusqu’à la clôture du processus, après quoi les soumissionnaires sont informés de la fin des négociations et invités à soumettre une offre finale, appelée BAFO (« Best And Final Offer »).

  • Attribution du marché : Après avoir vérifié la régularité des offres, le marché est attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse.

La procédure négociée directe avec publication préalable

Définition

La « procédure négociée directe avec publication préalable » est définie comme « la procédure de passation dans laquelle tout opérateur économique intéressé peut présenter une offre en réponse à un avis de marché et dans laquelle l'adjudicateur peut négocier les conditions du marché avec un ou plusieurs d'entre eux, et qui s'applique uniquement aux marchés relevant [des secteurs classiques] » (article 2, 29°, de la loi du 17 juin 2016).

Cette procédure ne comprend PAS deux étapes distinctes (sélection/attribution) : tout opérateur économique intéressé peut soumettre une offre après la publication de l’avis de marché et le pouvoir adjudicateur peut ensuite négocier sur la base des offres déposées par les soumissionnaires.

Le recours à ce mode de passation n’est possible que dans les cas limitativement prévus par l’article 41, § 1er, de la loi du 17 juin 2016, à savoir :

  • Pour les fournitures et services dont le montant estimé est inférieur au seuil de publicité européens.

  • Pour les travaux dont le montant estimé est inférieur à 750.000 euros.

Procédure

Le déroulement de la procédure comprend les étapes suivantes :

  • Publication de l’avis de marché :

    • Tout opérateur économique intéressé peut soumettre une offre en réponse à l’avis de marché.

    • Le délai minimal de réception des offres est de 22 jours à compter de l’envoi de l’avis de marché, pouvant être réduit en cas d’urgence.

  • Phase de négociation :

    • Les offres initiales et ultérieures font l’objet d’une négociation.

      Le pouvoir adjudicateur peut attribuer le marché sur la base des offres initiales sans négociation uniquement s’il a indiqué, dans les documents du marché, qu'il se réserve la possibilité de le faire et sous réserve d’une motivation.

    • Les exigences minimales et les critères d’attribution ne sont pas sujets à négociation.

    • Les négociations se poursuivent jusqu’à la clôture du processus, après quoi les soumissionnaires sont informés de la fin des négociations et invités à soumettre une offre finale, appelée BAFO (« Best And Final Offer »).

  • Attribution du marché : Après avoir vérifié la régularité des offres, le marché est attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse.

La procédure négociée sans publication préalable

Définition

La « procédure négociée sans publication préalable » est définie comme « la procédure de passation dans laquelle le pouvoir adjudicateur demande une offre aux opérateurs économiques de son choix et peut négocier les conditions du marché avec un ou plusieurs d'entre eux, et qui s'applique uniquement aux marchés relevant [des secteurs classiques] » (article 2, 26°, de la loi du 17 juin 2016).

Cette procédure ne comprend PAS deux étapes distinctes (sélection/attribution) : les soumissionnaires soumettent leur offre après avoir été directement consultés par le pouvoir adjudicateur et le pouvoir adjudicateur négocie ensuite sur la base des offres déposées par les soumissionnaires qu’il a consultés.

Le recours à ce mode de passation n’est possible que dans les cas limitativement prévus par l’article 42, § 1er, de la loi du 17 juin 2016, à savoir :

1° Marchés de travaux, fournitures ou services :

a)       Lorsque la dépense est inférieure aux montants fixés par le Roi (notamment, 5.538.000 euros pour les marchés de travaux).

b)       En cas d’urgence impérieuse due à des événements imprévisibles (qui ne peuvent être imputables au pouvoir adjudicateur), rendant impossible le respect des délais des autres procédures.

c)       Si aucune offre ou demande de participation appropriée n’a été reçue lors d’une procédure ouverte ou restreinte.

d)       Lorsque seul un opérateur économique peut réaliser le marché pour des raisons artistiques, techniques ou de droits d’exclusivité (ces deux derniers cas n’étant valables que s'il n'existe aucune solution de remplacement et que l'absence de concurrence n'est pas artificielle.)

2° Marchés de travaux ou services supplémentaires : Si ces prestations sont une répétition de travaux ou services similaires confiés au même adjudicataire, prévus dès le marché initial et attribués dans un délai de trois ans.

3° Achat de fournitures ou services à des conditions avantageuses : en cas de cessation d’activité du fournisseur ou de liquidation judiciaire.

4° Marchés de fournitures spécifiques :

a)       Produits fabriqués uniquement à des fins de recherche ou d’expérimentation.

b)       Fournitures complémentaires nécessaires pour éviter des incompatibilités techniques.

c)       Achats à une bourse de matières premières.

5° Marchés de services attribués après un concours.

Procédure

Le déroulement de la procédure – qui est peu encadrée et ne prévoit pas de délais – comprend les étapes suivantes :

  • Consultation directe des opérateurs :

    • Le pouvoir adjudicateur invite directement, « simultanément et par écrit », des opérateurs économiques à présenter une offre.

    • Le pouvoir adjudicateur doit consulter un nombre adéquat d'opérateurs économiques en fonction de la nature du marché, idéalement au moins trois, afin de garantir une concurrence suffisante.

  • Phase de négociation :

    • Les offres initiales et ultérieures peuvent être négociées.

    • Les critères d’attribution ne sont pas sujets à négociation. Les exigences minimales ne peuvent en principe être négociées.

  • Attribution du marché : Après vérification de la régularité des offres, le marché est attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse.

Pour information

Notons que d’autres procédures permettent également la négociation :

  • Le dialogue compétitif qui vise une procédure permettant la mise en place d’un dialogue avec les soumissionnaires, utilisée dans les cas où les pouvoirs adjudicateurs ne sont pas en mesure de définir les moyens permettant de satisfaire leurs besoins ou d’évaluer les solutions que le marché peut offrir sur les plans technique, financier ou judiciaire.

    Par exemple : projets complexes ou de grande envergure

  • Le partenariat d’innovation qui vise une procédure permettant une négociation avec les soumissionnaires en vue du développement et de l’acquisition ultérieure d’un produit, d’un service ou de travaux nouveaux et innovants.

    Par exemple : création d’un nouveau logiciel conçu spécifiquement pour le pouvoir adjudicateur

  • Le marché de faible montant ou « marché sur simple facture acceptée » qui visent les marchés dont le montant estimé est inférieur à 30.000 €. Ces marchés peuvent faire l’objet de négociation sans que la procédure ne soit encadrée par la réglementation si ce n’est qu’elle doit évidemment respecter les principes d’égalité et de transparence.

Précédent
Précédent

L’enregistrement des baux d’habitation : Région de Bruxelles-Capitale et Région Wallonne

Suivant
Suivant

Retour sur la circulaire wallonne 2024 relative aux permis d’urbanisme pour le photovoltaïque